Tempête n'est pas ton nom
Je suis l'esprit vivant au sein des choses mortes.
Tempête n’est pas ton nom
Mais ce qui éclaire ton visage
Quand l’esprit vogue jusqu’à toi...
Ô mer, qu’as-tu fait au Ciel ?
Azur, fidèle compagnon que pleures-tu ?
Aurais-tu contenu tes larmes-pluie
Que vivrait encore Abdou !
Je t’ai revu plusieurs fois
Tes yeux-phares se sont gravés sur mes paupières
Abdou, frère égaré au large de la Méditerranée
Naufragé guidant ma barque lors des nuits de fièvre
Longues nuits d’errance, de larmes et de peur
Le ciel pleurait, la mer envoyait ses vagues
Bras géants pour l’étreindre et le calmer
De ses millions de dents qu’il montrait
Ému, émanait fulgurance d’espoir
Tandis que colonnes d’eau
Hautes comme dix bâtiments
Ferraient ton corps…
Abdou !
Éclaboussant de l’encre noire du deuil
Cette soirée d’orage,
Comme les machettes Utus
Du sang des victimes sur la terre mère
Elle t’a enlevé Abdou
Noble fils d’Afrique
Pour ancrer ce soir à la tristesse populaire
Fixer tes yeux noirs au bleu de la mer
Aux rivages pleins d’Espoir de Lampedusa
Ce soir, le ciel pleure
Ses larmes sont blanches
Le pays que tu ne verras jamais
Te pleure
Et un vent tiède chante
Abdou le prince du Walo
Fils des Bracks que loue
Le vent
Chaque dimanche
À l’heure où les jinns
Quittent Gorée pour
Nager dans l’océan
Tempête n’est pas ton nom
Mais ce qui éclaire ton visage
Qui illumine les côtes et la mer
Et ton nom ce que souffle le vent
A l’oreille des naufragés : Abdou Khadre !
Parce que Abdou Khadre vivra toujours
Pour que tous se rappellent les oubliés